Le plus grand satellite de Neptune, Triton, et l'objet transneptunien Pluton, partagent de nombreuses similitudes. Les deux corps ont des tailles et densités similaires, les mêmes glaces à leur surface (H2O non volatil, et N2, CH4, CO, volatils, Cruikshank et al. 1993, 2000, Quirico et al 1999, Merlin et al., 2018) ainsi que la même composition atmosphérique (principalement N2 avec des traces de CH4 et CO), pression (de l'ordre de 1 Pa, par ex. Marques Oliveira et al., 2022 ) et température de surface (40-50 K).
Cependant, l'histoire géologique des deux corps diffère : Triton présente une surface géologiquement jeune, extrêmement plate (alors que Pluton a une topographie très marquée, Schenk et al., 2018 , 2021), et brillante partout avec un albédo de Bond globalement élevé (~0.6-0.8, McEwen, 1990) sans aucune région rougeâtre et sombre comme celles observées sur Pluton. La basse atmosphère de Triton est également plus froide que celle de Pluton, ce qui est lié à une abondance moindre en méthane dans l'atmosphère et dans les mélanges solides avec N2 à la surface. Enfin, sur Triton, Voyager 2 a observé des geysers actifs (Soderblom et al., 1990) et detecté de la glace de CO2, ce qui n'est pas le cas sur Pluton.
L'atmosphère et les glaces de Pluton et Triton ont été modélisées à l'aide des mêmes modèles climatiques et de transport des glaces (qui peuvent également s'adapter à d'autres TNOs). Ces modèles permettent d'interpréter, dans un contexte climatique, les observations de Pluton et Triton par les sondes et les télescopes terrestres. Par exemple, ils ont permis de mettre en évidence les mécanismes contrôlant la formation des glaciers et givres saisonniers sur ces corps (Bertrand and Forget, 2016, Bertrand et al., 2018, 2019, 2020, 2022), comme l'accumulation de la glace d'azote dans le bassin d'impact Sputnik Planitia sur Pluton ou au sein d'une calotte polaire sur Triton. Ils ont également permis de comprendre l'évolution de leur pression de surface sur plusieurs décennies, observée par la méthode des occultations stellaires (Meza et al., 2019, Marques Oliveira et al., 2022). Enfin, ils permettent de mieux comprendre pourquoi les surfaces de Triton et Pluton ne se ressemblent pas, alors qu'elles possèdent pourtant les mêmes ingrédients.